Droit européen de l’achat de foncier viticole : des réponses face aux inquiétudes d’accaparement des terres ?
Auteur : GAUCHER-PIOLA Alexis
Publié le :
18/10/2017
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Afin de préserver le droit de propriété et notamment le droit pour chaque propriétaire de vendre son exploitation, le droit européen du foncier agricole n’est pas en mesure d’intervenir et renvoie cette responsabilité aux états membres mais avec beaucoup de restrictions, de telle sorte que les inquiétudes d’accaparement des terres ne vont pas se dissiper avant longtemps.
L’accaparement de l’actif foncier agricole, et donc notamment viticole, inquiète grandement dans les pays agricoles membres de l’Union Européenne.
Cet accaparement des terres par des investisseurs qu’ils soient étrangers, sociétés financières, fonds d’investissement, qui n’ont strictement aucune vocation agricole, inquiète en premier chef les viticulteurs.
A titre d’exemple, en Roumanie, environ 10 % des surfaces agricoles (soient 1 million d’hectares) sont aux mains d’ investisseurs originaires de pays tiers.
En France, la presse s’est par exemple émue qu’une société financière d’origine chinoise ait pu finaliser une acquisition de plus de 1 500 hectares en Indre, il y a à peine quelques mois.
En Gironde, près de 125 propriétés viticoles sont passées entre les mains de groupes chinois et depuis plusieurs années, de nombreuses autres entre les mains d’institutionnels, compagnies d’assurances, groupes bancaires… etc…
Les spécialistes s’accordent pour dire que la SAFER et le Contrôle des structures n’auraient pas suffisamment de pouvoirs pour contrôler ces acquisitions dans la mesure où la SAFER ne bénéficie d’un droit de préemption dans le cadre d’acquisitions viticoles, que si la cession de la propriété se fait dans sa totalité des parts cédées.
Une loi du 20 mars 2017 est intervenue afin de lutter contre l’accaparement des terres et visant à renforcer le pouvoir des affaires mais a fait l’objet d’une censure importante du Conseil Constitutionnel.
Mais dans le cadre d’un recours constitutionnel, un nombre important de dispositions législatives ont été déclarées contraire à la constitution et notamment celles relatives à l’élargissement du droit de préemption de SAFER aux cessions partielles de parts ou actions de sociétés.
Sur le plan du droit de l’union européenne, il peut être affirmé qu’il n’y a donc pas de protection à l’accaparement des terres agricoles.
En effet, le droit de l’Union Européenne consacre, dans sa plénitude le droit de propriété.
En effet l’article 345 du Traité de l’Union Européenne dispose que les traités de l’union européenne ne préjugent en rien le régime de la propriété dans les états membres, laissant ainsi les états membres libres de régler ces questions d’accaparement.
Mais si l’Union Européenne renvoie les états membres à leurs propres responsabilités afin de tenter de réglementer ces accaparements des terres agricoles, c’est aussi avec beaucoup de mesures.
En effet, l’article 63 du Traité de l’Union Européenne dispose que toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les états membres et les pays tiers sont interdites. C’est le principe européen de libre circulation des capitaux. Ce principe étant rappelé par la Cour de Justice de la Communauté Européenne selon laquelle les investissements qui sont faits dans le cadre d’acquisition de foncier agricole correspondent à des mouvements de capitaux, lesquels relèvent donc du principe européen de la libre circulation des capitaux qu’il n’est pas possible de limiter.
Le droit européen du marché foncier agricole ne permet, en réalité, aux états membres que de réglementer ledit marché par des mesures qui soient strictement justifiées et proportionnées mais aussi en corrélation avec les objectifs poursuivis par le législateur en matière agricole, telle que la préservation de l’exploitation des terres agricoles en faire valoir direct, le maintien d’une population permanente en milieu rural ou bien encore le fait de favoriser un usage raisonnable des terres disponibles en agissant contre la pression foncière : ces objectifs correspondent à ceux de la PAC.
Ainsi, afin de préserver le droit de propriété et notamment le droit pour chaque propriétaire de vendre son exploitation, le droit européen du foncier agricole n’est pas en mesure d’intervenir et renvoie cette responsabilité aux états membres mais avec beaucoup de restrictions, de telle sorte que les inquiétudes d’accaparement des terres ne vont pas se dissiper avant longtemps.
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